Le 16 septembre 1824, Louis XVIII rend son âme à Dieu. Aujourd’hui, il demeure le dernier souverain à mourir sur son Trône. Louis XVI, son frère ainé, a été guillotiné, Charles X, son frère cadet, est mort comme un lépreux en exil, un sort partagé avec Louis-Philippe, Napoléon et son neveu Napoléon III. Lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques l’animatrice Daphné Bürki a affirmé que la place de la Concorde avait été le théâtre de la fin de la Monarchie, Louis XVI et Marie-Antoinette y ayant été décapités…alors qu’elle fut aussi le témoin de sa renaissance, mais l’imaginaire révolutionnaire, à la mémoire sélective, a fait tomber la Restauration (1814-1830) aux oubliettes de l’Histoire.
Après sa campagne de Russie désastreuse, une vraie Bérézina, « voilà le commencement de la fin » selon l’expression de Talleyrand, et sa défaite à la Bataille des Nations (Leipzig, 16-19 octobre 1813), Napoléon bat en retraite, la campagne de France s’engage. Vaincu, le 3 avril 1814, le Sénat prononce sa déchéance « coupable d’avoir violé son serment et attenté aux droits des peuples en levant des hommes et des impôts contrairement aux institutions ». Pendant que les cosaques venus de la steppe d’Ukraine campent sur les Champs Elysées, à Fontainebleau l’Aigle Corse fait ses adieux et se prépare à quitter son nid pour une “migration” vers l’île d’Elbe. Le 6 avril 1814, le « fils de la Révolution » abdique.
Le dimanche 10 avril 1814, jour de Pâques, Alexandre Ier, petit-fils de la grande Catherine II de Russie, fait célébrer la Divine Liturgie d’action de grâces place de la Concorde à l’endroit même où se dressait l’échafaud de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Dans les Mémoires d’Outre-Tombe, Chateaubriand s’interroge : « Les soldats et les souverains mirent genou en terre pour recevoir la bénédiction. Quelle main avait conduit à la fête des expiations ces hommes de tous les pays, ces fils des anciennes invasions barbares, ces Tartares, dont quelques-uns habitaient des tentes de peaux de brebis au pied de la grande muraille de Chine ? » Le tsar écrit à Alexander Galitzine, son confident : « C’était pour mon cœur un moment solennel, émouvant et terrible. Voici que j’ai amené, par la volonté insondable de la Providence, mes guerriers orthodoxes du fond de leur froide patrie nordique pour élever vers le Seigneur nos prières communes dans la capitale de ces étrangers qui, récemment encore, s’attaquaient à la Russie, à l’endroit même où la victime royale succomba à la fureur populaire. Le tsar de Russie priait, selon le rite orthodoxe, avec son peuple, et de la sorte purifiaient la place ensanglantée. » Dix huit mois plus tôt la Grande Armée occupait Moscou, à Saint-Louis-des-Français le prêtre ne pouvait que constater sa déchristianisation. Les messes n’étaient suivies que par une poignée de soldats issus de l’ancienne aristocratie restée fidèle à l’héritage du baptême de Clovis et de ses guerriers. Dans un élan patriotique, peut-être avait-on prié pour la France. Si ce fut le cas, les prières catholiques n’auront pas été entendues par le Ciel, l’Empire s’écroula et au jardin des Lys on vit éclore un nouveau rameau sous la bénédiction des prières…orthodoxes des prêtres moscovites de la place de la Concorde !
Appelé au Trône de France avec l’approbation des puissances coalisées, le 24 avril 1814, à Calais, Louis XVIII débarque du navire Royal Sovereign. Une Charte constitutionnelle est élaborée par neuf sénateurs, neuf députés et trois commissaires. Le 4 juin 1814, elle est octroyée par le Roi avalisant ainsi l’essentiel des conquêtes de la Révolution française de 1789 (égalité devant la loi et l’impôt) et la religion catholique, apostolique et romaine, redevient religion d’État. Emmanuel de Waresquiel précise : « On pouvait difficilement aller plus loin, surtout si l’on considère le niveau des libertés publiques dans le reste de l’Europe. Même en Angleterre, à la même époque, les minorités religieuses ne sont pas égales devant la loi. »
Nicolas Chotard,
Président des Lys de France
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