L'art de vivre à la Française

Auteur/autrice : Clothilde Colin

Elisabeth de France

Élisabeth de France dite Madame Élisabeth,

née le 3 mai 1764 à Versailles,

guillotinée le 10 mai 1794 place de la Révolution

(Place de la Concorde) à Paris

Le 15 novembre 2017, le Cardinal de Paris André Vingt-Trois, à la suite de l’avis de la Conférence des évêques de France et du nihil obstat de la Congrégation pour la cause des saints, ouvre la cause en canonisation d’Elisabeth de France, l’abbé Xavier Snoëk devient son postulateur.

           Critique à l’égard des idées nouvelles, Madame Elisabeth s’est évertuée à mettre en garde Louis XVI, son frère espérant aussi l’alliance des puissances étrangères et des émigrés. Hostile à la Constitution civile du Clergé elle défend la France traditionnelle, celle consacrée sur le baptistère de Reims. Refusant d’émigrer, Madame Elisabeth partage jusqu’à la fin le sort de la famille royale de la journée du 6 octobre 1789 avec son départ à jamais de Versailles sous la contrainte des femmes venues de Paris à la “fuite” à Varennes puis à son “embastillement” à la Tour du Temple. Après le départ de la prison de la Reine pour le chemin du martyr, elle veille sur les enfants, à Marie-Thérèse-Charlotte elle rappelle les propos de son père le Roi défunt : “La religion est la source du bonheur et notre soutien dans l’adversité ; ne croyez pas que vous en soyez à l’abri ; vous ne savez pas, ma fille, à quoi la Providence vous destine.”

                                                                                                                              10 mai 1794

10 heures, Madame Elisabeth est conduit devant le tribunal révolutionnaire, la jeune trentenaire sait qu’elle assistera à une parodie de justice, le procès est “préfabriqué” avec impossibilité de correspondre avec son avocat. La sentence de l’accusateur public Fouquier-Tinville est sans appel : “Elisabeth Capet, soeur de Louis Capet, dernier tyran des Français, née à Paris (en réalité à Versailles), y demeurant … (vient ensuite la liste des 25 coaccusés) est condamnée à la peine de mort et les biens desdits acquis à la République en conséquence de la loi du 10 mars 1793.” Sa réplique est cinglante : « Si mon frère eût été ce que vous dites, vous ne seriez pas là où vous êtes, ni moi, là où je suis ! ». À un homme des Lumières scandalisé par sa condamnation elle répond calmement : « S’il est beau de mériter l’estime de ses concitoyens, croyez qu’il est encore plus beau de mériter la clémence de Dieu. ». Un an plus tard, lors de son procès, le futur guillotiné assura qu’il avait agi en vertu des lois portées par la Convention déclarant même avec aplomb « J’étais la hache de la Révolution, punit-on une hache ? »

Dans l’attente de son exécution elle apporte son aide spirituelle à ses compagnons d’infortune parmi lesquels l’ancien ministre Loménie de Brienne, Madame de Lamoignon, Madame de Montmorin et son fils, et sauve la vie de la comtesse de Sérilly qu’elle convainc de déclarer sa grossesse. Dans cette France des heures les plus sombres où le sang coule abondamment, l’esprit des Lumières qui souffle sur le Tribunal révolutionnaire se refuse à condamner à mort un innocent. Ainsi sa mère sera graciée, survivra à la Terreur et “Hosanna !” donna naissance à un petit garçon.

Le tyran Fouquier-Tinville lui refuse l’assistance d’un prêtre. Mais le Seigneur veille et a mis sur la route de sa charrette un “saint prêtre” qu’elle aperçoit à une fenêtre, il fait alors le signe de croix lui donnant ainsi à distance l’absolution. Probablement récite-t-elle aussi une dernière fois sa prière quotidienne qu’elle avait composée lorsqu’elle était prisonnière : “Que m’arrivera-t-il aujourd’hui, ô mon Dieu, je l’ignore. Tout ce que je sais, c’est qu’il ne m’arrivera rien que Vous ne l’ayez prévu de toute éternité. Cela me suffit, ô mon Dieu, pour être tranquille. J’adore Vos desseins éternels, je m’y soumets de tout mon coeur. Je veux tout, j’accepte tout, je Vous fais le sacrifice de tout ; j’unis ce sacrifice à celui de Votre cher Fils, mon Sauveur. Vous demandant, par son Sacré-Coeur et Ses mérites infinis, la patience dans mes maux et la parfaite soumission qui Vous est due pour tout ce que Vous voudrez et permettrez. Ainsi-soit-il“. Ainsi, elle tient sa force et son courage de sa foi, de son abandon à Dieu.

13 heures, Madame Elisabeth, tel Jésus s’offrant en holocauste pour racheter les péchés des hommes, monte à l’échafaud, le sein de Dieu lui ouvre ses portes. Plusieurs témoins affirment qu’à l’instant où son âme est montée au Ciel quittant ce corps martyrisé, une odeur de rose se répandit.

Nicolas Chotard,

Président des Lys de France.

La fête johannique

Fête johannique d’Orléans 2022

Jeanne d’Arc était incarnée par Clotilde Forgeot d’Arc, descendante de Pierre d’Arc, dit Pierrelot, l’un des frères et compagnons d’armes de Jehanne.

Crédit Photos : Vincent Dresens

       Pour l’Eglise elle est une sainte, pour la République une héroïne, la moyenâgeuse Jeanne d’Arc n’a jamais été autant “moderne”, tout le monde ou presque s’en réclame dans notre France déchristianisée. Pourtant on ne peut pas réécrire son histoire intrinsèquement liée à sa foi. Sans ses voix intérieures elle n’aurait jamais quitté sa Lorraine pour venir en France, y lever le siège mis devant la cité d’Orléans puis rétablir la Légitimité de Charles VII, roi de France, en le conduisant à Reims, cœur de la chrétienté du royaume depuis Clovis et cité des sacres.

        Au XVe siècle, dans une société qualifiée de “patriarcale” elle a été la première femme chef des armées non pas par idéologie féministe dans une France progressiste mais parce qu’elle était portée par le feu ardent de sa foi dans une France traditionnelle, catholique qui croyait en la Providence, à ses vertus divines capables de mettre sur le chemin du “gentil Dauphin” une femme ayant pour devise “Messire Dieu, premier servi“. À l’abbaye de Fleury à Saint-Benoît-sur-Loire, elle ose cet acte juridique singulier de la triple donation du Royaume de France. Jehanne dit à Charles : « Sire, me promettez-vous de me donner ce que je vous demanderai ? » Le Roi perplexe, hésite, puis consent. « Sire, donnez-moi votre royaume ». Le Roi, ébahi, mais bon chrétien, respectueux de la parole donnée, s’exécute « Jehanne, je vous donne mon royaume ». Elle vient de “détrôner” le roi et s’exclame : « Voici le plus pauvre chevalier de France : il n’a plus rien ». Jehanne réalise alors son “coup de maître” et fait rédiger, par acte notarié, la triple donation du Royaume de France : « Le 21 juin de l’an de Jésus Christ 1429, à 4 heures du soir, Charles VII donne son royaume à Jehanne. Jehanne donne à son tour le royaume à Jésus-Christ et Jésus-Christ, Seigneur éternel, le donne au Roi Charles. »

       En 1994, le sénateur des Vosges Albert Voilquin (Groupe des Républicains et Indépendants) dans une question écrite au gouvernement attirait l’attention du Premier ministre sur la loi du 14 juillet 1920, adoptée à l’unanimité par la Chambre des députés et par le Sénat, et publiée par le Président de la République : article premier. La République française célèbre annuellement la fête de Jeanne d’Arc, fête du patriotisme ; article 2. Cette fête a lieu le deuxième dimanche de mai, jour anniversaire de la délivrance d’Orléans ; article 3. Il sera élevé en l’honneur de Jeanne d’Arc, sur la place de Rouen, où elle a été brûlée vive, un monument avec cette inscription : “A Jeanne d’Arc, le Peuple français reconnaissant.” La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l’Etat. Il s’agit donc là d’une loi qui est toujours en vigueur, et qui semble quelque peu avoir été oubliée, plus particulièrement cette année-là, où la fête de notre héroïne nationale tombait en même temps que l’anniversaire des retrouvailles avec la liberté. Il semble en effet qu’aucune célébration officielle n’ait eu lieu dans la capitale, alors que, sans vouloir regretter le passé, autrefois, les gouvernements, les pouvoirs publics, dans la capitale et ailleurs, honoraient celle qui est le symbole du patriotisme, et dont Michelet a dit que “de son coeur est né le patriotisme”. Dans les circonstances actuelles, Jeanne d’Arc est le symbole aussi bien de ceux qui ont souffert en captivité que de ceux qui ont résisté et de ceux qui ont contribué à défendre la patrie. Il espérait que la loi serait rappelée, pour que cette fête nationale ne soit pas celle de l’oubli.

       Edouard Balladur, Premier ministre, lui répondait : “Comme indique l’honorable parlementaire, la loi du 10 juillet 1920 qui institue une fête nationale de Jeanne d’Arc, fête du patriotisme, est toujours en vigueur. Cette fête donne lieu chaque année à une célébration le deuxième dimanche du mois de mai. A Paris, une cérémonie est organisée traditionnellement place des Pyramides dans le 1er arrondissement, avec la participation de moyens militaires. L’usage veut qu’elle soit placée sous la présidence du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et qu’une gerbe soit déposée par le représentant de l’Etat. Enfin, le secrétaire général du Gouvernement rappelle, chaque année, aux ministres que les édifices publics doivent être pavoisés aux couleurs françaises à cette occasion. Ce rappel a été effectué en 1994 par lettre du 13 avril. Le Gouvernement veillera, comme par le passé, à ce que la fête de Jeanne d’Arc, fête du patriotisme, continue d’être célébrée à l’avenir conformément aux dispositions de la loi et dans l’esprit que rappelle, à juste titre, l’honorable parlementaire.

Trente ans plus tard, il serait intéressant de savoir combien d’élus respecteront cette loi républicaine en allant dimanche prochain déposer une gerbe devant une statue de sainte Jeanne d’Arc ?

Nicolas Chotard,

Président des Lys de France.

Emmanuel de Waresquiel

« La Révolution s’est jouée et accomplie en sept jours et cinq décrets. Son destin, ses héritages y sont comme scellés. Jusqu’à la guerre civile. Jusqu’à la Terreur. »

Emmanuel de Waresquiel ouvre son ouvrage avec une citation de Chateaubriand, De la Vendée, 1819 « La Révolution était achevée lorsqu’elle éclata : c’est une erreur de croire qu’elle a renversé la monarchie, elle n’a fait qu’en disperser les ruines

      On “supplie respectueusement Sa Majesté” pouvait-on lire dans les Cahiers de Doléances de 1789 “miroir de la société”. On y retrouve des revendications populaires souvent légitimes mais non révolutionnaires. On veut que soit “fonder dans toutes les parties du Royaume divers hôpitaux auxquels on pourrait assigner sans injustice de revenus“, “Que la noblesse ne soit plus un titre inhérent à la propriété des charges, mais qu’elle soit la récompense des services rendus à l’État“, “Que l’université de la Ville de Caen laquelle possède quantité de biens des bontés de votre majesté soit obligée de tenir des petites écoles pour l’instruction des enfants et avoir des maîtres pour leur enseigner à lire à écrire et l’arithmétique et le tout gratis…” Avec la convocation des Etats Généraux, Louis XVI rassemble en un même lieu des députés appartenant pratiquement tous à la même classe sociale supérieure ultra minoritaire, celle acquise aux idées nouvelles alors que le peuple demeure attaché à la Cité traditionnelle. En ouvrant la boîte de Pandore, le “roi bienveillant” fait entrer les renards dans la basse-cour et se condamne inexorablement à l’échafaud, le malheureux incarne l’Ancienne France.

     Si la France monarchique était construite comme une Cité classique tendant vers le bien commun, dans la société moderne l’Etat détermine lui-même où est le bien. Comme le rappelle le professeur Guillaume Bernard dans son ouvrage “Introduction à l’Histoire du Droit et des Institutions” : “Dans la conception classique, le droit consiste en une attribution de choses extérieures, a pour fin la justice, il se dit à l’indicatif. Dans la conception moderne, le droit est un ensemble de règles de conduites sanctionnées par le pouvoir de l’Etat. Pour la pensée classique le droit est la recherche du bon et de l’égal. Pour la vision moderne, le droit est une technique de direction des conduites humaines. Alors que pour la pensée classique, la légalité est soumise à la justice, pour la modernité, le légal devient synonyme de juste, au lieu que le pouvoir tienne de la justice sa Légitimité, elle en est l’instrument. Du point de vue classique, le politique est le prolongement du juridique, le droit public est le symbole d’un équilibre et la justice ordonne au législatif. A l’inverse dans la conception moderne, le juridique devient la conséquence du politique, le droit public est désormais l’expression d’une puissance et le législatif commande à la justice.

      “A la fin du XVIIIème siècle, le changement de société entraîna un renouvellement de la conception du droit. La loi moderne devient objet de culte. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen fut la traduction juridique concrète de cet amour de la loi propre aux philosophes. C’est un nouveau monde juridique qui fut mis en oeuvre lorsque le 26 août 1789 les députés de l’Assemblée constituante votèrent la Déclaration des Droits de l’Homme, aujourd’hui intégrée au Bloc de constitutionnalité. Une loi universelle, invariable, naturelle existait dans la Rome chrétienne. Cette loi éternelle était la source de la justice selon saint Augustin (354-430). Mais cette loi n’avait que peu de lien avec celle des Lumières. Pour l’auteur de la Cité de Dieu, la loi éternelle s’identifiait à la volonté de Dieu et fondait la justice sans laquelle il n’existait pas de res publica. Pour les modernes, la loi était universelle parce qu’elle était le fruit de la raison humaine. Provenant de tous, elle s’étendait à tout et à tous.

       L’esprit des Lumières demeure la pierre angulaire de notre société occidentale. Toutes les réformes sociétales répondent à cette notion de progrès social exprimé par les philosophes (tels le mariage homosexuel, le féminisme, la culture LGBT). Il n’est pas possible de s’y soustraire dès lors qu’on ambitionne une carrière publique. À la pétition de Francis Huster invitant le Président de la République à faire entrer Molière au Panthéon, Valérie Pécresse a répondu favorablement. Mais, l’Elysée lui a simplement rappelé l’esprit du lieu « le Panthéon est un temple laïc, enfant de la patrie républicaine, elle-même engendrée par les Lumières. C’est pour cette raison que toutes les figures qui y sont honorées sont postérieures aux Lumières et à la Révolution. ».

       En vous souhaitant un bon Carême, un bon cheminement vers Pâques, vers LA Lumière, le Christ-Sauveur.

 Nicolas Chotard,

Président des Lys de France.

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